les “opérations site mort” imposées par Orange sont du télétravail forcé Le 10 juin dernier, Orange a décidé de fermer 43 ou 44 sites Orange en France (43 sites selon l’url, 44 selon le texte, ils ont probablement rajouté un 44ième site au dernier moment). Bien sûr, l’argument mis en avant est " la consommation énergétique et son empreinte carbone". Ils n’ont pas un mot pour les économies financières, comme si cette préoccupation ne rentrait absolument pas en ligne de compte.
les “opérations site mort” imposées par Orange sont du télétravail forcé
Le 10 juin dernier, Orange a décidé de fermer 43 ou 44 sites Orange en France (43 sites selon l’url, 44 selon le texte, ils ont probablement rajouté un 44ième site au dernier moment).
Bien sûr, l’argument mis en avant est " la consommation énergétique et son empreinte carbone". Ils n’ont pas un mot pour les économies financières, comme si cette préoccupation ne rentrait absolument pas en ligne de compte. Le document pdf accompagnant la mesure confirmequ’il s’agit d’un plan de sobriété énergétique, mais pas d’un plan d’économie financière.
D’ailleurs, puisque les fermetures de site sont “renouvelées en 2024”, on aimerait avoir un bilan des fermetures de site en 2023, pour connaître les économies réalisées en matière d’énergie, et les réductions d’empreinte carbone suite à ces fermetures occasionnelles.
D’après la page web présentant la mesure, ceux qui le peuvent et qui le souhaitent doivent utiliser un jour de télétravail régulier, ou un jour de télétravail occasionnel. Ceux qui ne “peuvent pas ou ne souhaitent pas” faire de télétravail sont invités à se replier sur un site de repli, un site d’accueil distant. Il faudra pour cela anticiper et demander à son manager d’ouvrir les droits d’accès au site en question, comme s’il n’avait que ça à faire…
Selon l’accord de télétravail signé le 17 mai 2003, “le travail s’effectuant dans un espace de travail proposé par l’entreprise différent de celui d’affectation du salarié” (page 4) entre dans le cadre du télétravail. On peut donc s’amuser à jouer sur les mots, mais aller travailler sur un site de repli, un site d’accueil distant, c’est bien du télétravail. Autrement dit, en enlevant la couche de novlangue, ces “opérations site mort” sont donc bien des opérations de télétravail forcé : on a le choix entre télétravailler depuis chez soi, ou télétravailler depuis un site distant.
Dans les accords de télétravail en vigueur, il est pourtant clairement indiqué que le télétravail est fondé sur un principe de double volontariat, du salarié et de l’entreprise. Mais où est le volontariat quand on n’a que le choix entre télétravailler ou poser un congé ?
Où est le volontariat quand le salarié ne dispose plus de congés ? Seule solution : le télétravail (forcé).
Comment télétravailler de chez soi quand on ne dispose pas des conditions permettant de télétravailler ? Seule solution : le télétravail (forcé) sur un site distant.
Comment travailler quand le seul endroit qui regroupe des ressources nécessaires au travail (labo, type de réseau spécifique, équipement particulier) n’est pas accessible ? Pas de solution.
On le voit : tous les problèmes qu’on peut rencontrer avec ce télétravail forcé trouve sa solution soit dans une forme de télétravail, ou bien n’a pas de solution.
Le problème est d’autant plus manifeste quand certains sites décident de fermer toute la semaine au lieu d’un seul jour (comme le site de Meylan, fermé du 6 au 10 mai 2024).
Une esquisse de solution vient paradoxalement des stagiaires qui ne disposent normalement pas de congé, n’étant pas soumis aux règles d’un contrat de travail. Leur statut particulier les protège de ce télétravail forcé : ces jours leurs sont offerts sous forme de congés. Une bonne idée qui devrait être reprise et généralisée à tous les salariés qui ne voudraient pas ou ne pourraient pas télétravailler.
Pour aller plus loin, il faut essayer de comprendre pourquoi l’entreprise ferme ainsi la totalité de ses sites de manière occasionnelle. En forçant tous ses salariés à télétravailler sur un site distant, Orange banalise les postes de travail, banalise ses salariés. Tous les postes de travail se valent. Tous les salariés se valent. Tout est interchangeable. Les salariés peuvent tous aller travailler sur tous les postes de travail car plus rien n’est spécifique : ni les postes de travail, ni les salariés. Adieu les labo de recherche, adieu les double-écran, adieu les bureaux assis-debout, adieu le réseau innovation, adieu les livebox de test. Vous êtes priés de vous standardiser en faisant du Microsoft Office 365 sur des postes Windows e-buro assis sur une chaise sur un écran de portable. Vous devenez le produit standard et interchangeable dont rèvent tous les RHs et tous les directeurs. Malléable à merci, ce premier effort qui vous est demandé n’est que le premier d’une longue liste où chaque salarié devra s’adapter à des conditions de travail en perpétuelle dégradation.
L’étape suivante - déjà en cours - est la généralisation du flex (appelé trompeusement le “bureau dynamique”) qui nécessite justement un formatage des besoins et une standardisation des solutions. Tout le monde doit se satisfaire du même bureau, avec le même écran et les mêmes outils.
De plus, avec le flex, et un taux foisonnement de 0,6 bureau par salarié, les managers vont devoir mettre en place des règles d’autorisation à venir sur le site, pour que chaque équipe puisse se retrouver au moins un jour par semaine, et donc mettre en place du télétravail forcé. Conséquence de cela : il faudra laisser la place à ces équipes certaines jours. La notion de volontariat sera encore affaiblie quand nous aurons des jours de télétravail obligatoires pour laisser la place à d’autres.
Standardisation des solutions ? Télétravail forcé ? Tiens donc ! Ce fermeture occasionnelle des sites d’Orange seraient donc des exercices d’entraînement des salariés aux dégradations à venir de leurs conditions de travail ?
On est décidément bien loin des considérations écologiques et énergétiques avancées en introduction de la mesure…