Pas une de Plus


Pourquoi cette date ? Le 25 novembre 1960, la dictature dominicaine assassine les sœurs Mirabal, trois militantes politiques de l’opposition. Leur résistance a d’abord été celle de Minerva, confrontée à la cour assidue du dictateur Trujillo, mais soutenue par sa famille. Plus tard, proche du parti socialiste populaire, galvanisée par la chute de dictateurs sud-américains et du soutien des castristes de Cuba, Minerva envisage le même destin pour son pays. Elle participe au « mouvement du 14 juin », dont les membres sont rapidement dénoncés, emprisonnés, torturés. Libérées, Minerva et ses sœurs sont assassinées sur la route en rendant visite à leurs maris toujours détenus. En 1999, l’Assemblée Générale des Nations Unies déclare le 25 novembre ‘’journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes’’.

Pourquoi spécifiquement les femmes ? Parce qu’il n’y a pas de symétrie entre les violences contre les femmes et celles dont les hommes sont victimes. Les violences sexistes et sexuelles s’inscrivent dans un continuum de violences PARCE QUE CE SONT DES FEMMES, ou qu’elles appartiennent à une minorité de genre qui ne se définit pas ou n’est pas reconnue comme « homme ».Les violences à l’égard des femmes prennent une multitude de formes : discriminations fondées sur le sexe (accès aux soins, au logement, à l’eau, à la terre, rémunération absente ou moindre…), agissements sexistes, harcèlement sexuel ou moral, agressions sexuelles, violences physiques, viols, féminicides, viols de masse, gynécides … Elles prennent racine dans le patriarcat et sont présentes dans toutes les sphères de la société, et le travail n’y échappe pas !

La France, condamnée pour ses lacunes contre les violences faites aux femmes

La France vient d’être condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme en raison de l’insuffisance de la loi pénale à offrir un cadre législatif suffisamment protecteur des victimes de violences sexuelles, et de l’application ineffective par les autorités judiciaires françaises de cette loi. La Cour pointe, entre autres, l’absence de prise en compte par la Cour d’Appel de Nancy, du contexte professionnel, de l’auteur envers la victime, de sa position hiérarchique, de l’autorité fonctionnelle qu’il exerçait, et de la fragilité psychique de Madame X objectivée pendant l’enquête et aggravée par les faits : autant d’éléments qui auraient dû être pris en compte pour apprécier l’absence de consentement de la victime.Le 6 novembre 2025, la loi a été modifiée pour préciser les conditions du consentement : éclairé, spécifique, préalable et révocable.

Orange est loin d’innover et de montrer l’exemple !

Orange a le diagnostic :

En France, les femmes déclarent le double de violences sexuelles au travail, 4% contre 2% pour les hommes. De même, pour les violences physiques, 2% contre 1% pour les hommes. Elles subissent également davantage d’insultes et de pressions psychologiques. Chez Orange, l’enquête triennale du Comité National de Prévention du Stress a permis d’objectiver que les femmes sont plus victimes de ces violences sexistes et sexuelles … au cas où certains en douteraient encore. A la question ‘’J’ai subi au moins une fois dans les 12 derniers mois des violences verbales de la part de collègues, répondent positivement 20% de femmes, contre 16% d’hommes. La situation s’aggrave en défaveur des femmes puisqu’en 2021, lors de la précédente enquête, c’était 14% pour les femmes et 12% pour les hommes. Les violences verbales de la part de subordonné.es sont perçues comme plus fréquentes dans les petites équipes, là où le taux de féminisation de l’encadrement augmente. Concernant les agissements sexistes ce sont 12 % des femmes, contre 9% des hommes qui indiquent qu’elle se sentent ignorées ou empêchées de s’exprimer par une ou plusieurs personnes. Les femmes restent aussi significativement plus exposées que les hommes au harcèlement sexuel : 4% des femmes déclarent avoir subi ce type de comportement par le passé, contre 0,8% des hommes. Les femmes entre 26 et 35 ans se déclarent plus subir, comparativement aux autres tranches d’âge. Dans un contexte où la structure d’emploi se masculinise, la voix des femmes, et des femmes victimes risque d’être encore plus étouffée.

Orange a des obligations :

Les employeurs ont la double obligation de prévenir le harcèlement sexuel et les violences sexistes et sexuelles au travail, et de protéger la sécurité et la santé de l’ensemble des salarié.es.

Orange : faites ce que je dis, pas ce que je fais

Si la communication s’est améliorée, elle peine à se concrétiser en changement de comportement des auteurs, mais aussi de leur entourage et hiérarchie … et l’impunité des agresseurs persiste. Orange continue à nier la nécessité d’élaborer un Document Unique d’Évaluation des Risques (DUER) en tenant compte du genre, sous prétexte qu’il n’y a pas de risques spécifiques pour les femmes chez Orange. Orange ne donne aucun moyen pour la référente ou le référent CSE harcèlement sexuel/moral/agissements sexistes ;même pas d’être averti.e des plaintes pour violences sexistes et sexuelles.

Le pompier pyromane : un DRH d’Orange, agresseur sexuel
Le 15 octobre dernier, c’est un DRH d’une direction nationale d’Orange, qui passait en jugement pour agressions sexuelles
embrasser sur la bouche, toucher la cuisse, effleurer les seins… Une cadre a porté plainte, soutenue ensuite par trois femmes, victimes du même comportement, qui ont témoigné par écrit. S’il s’arrêtait une fois que l’une trouvait le courage de lui signifier son désaccord, il récidivait avec une autre, toujours persuadé de son pouvoir de séduction, alors qu’il abusait de son statut, de moments de vulnérabilité de ces femmes, de sa réputation de DRH sympa. Les privilèges sont transparents pour ceux qui en jouissent et s’illusionnent sur une égalité, celle qui donnerait la liberté aux femmes de leur dire non, et de protéger leur intégrité. Le 1er signalement avait donné lieu à : « Je vais lui en parler » ; le 2nd,, à une réponse plus en phase avec le protocole prévu : une enquête par un cabinet externe, dont les conclusions étaient sans ambiguïté sur les faits et leur gravité. Et… notre DRH est muté sur d’autres fonctions, en télétravail, jusqu’à sa retraite, qu’on lui conseille de ne pas tarder à prendre. Suspendu en attente de conseil de discipline ? Non, il bénéficie de ses 7 000 euros de salaire complet pendant les mois qui précédent son départ définitif. Sans le courage de la plaignante, sans la justice et son délai de prescription de 6 ans après les faits (2 mois en matière de discipline), il n’y aurait eu que l’omerta au sein de l’entreprise. Le verdict est attendu pour le 26 novembre prochain. Ce cas est un exemple emblématique des manquements d’Orange en matière d’obligations et de protection des salariées concernant les violences sexistes et sexuelles au travail.