Madame la Directrice Générale,
Concomitamment à votre arrivée, une réorganisation débute à Orange Innovation. Elle prévoit de démanteler les équipes de production logicielle et d’intégration-validation basées en France (SOFT et IVA) et de les disperser dans des entités organisées par domaine d’activité. Nous pouvons déjà dire que c’est un anachronisme, dans la manière et dans l’orientation.
C’est un anachronisme car il n’est plus possible de préparer de telles réorganisations en petits comités non représentatifs et de nous les imposer, nous ne sommes pas juste des exécutant·es, nous sommes toutes et tous les partenaires de la réussite d’Orange. Mais c’est également anachronique car le développement et l’intégration de produits et services modernes, dans notre environnement compétitif, requiert de la souplesse alors qu’affecter les effectifs dans des thèmes rigidifie l’organisation ; pour changer de thème, il faut un changement de poste. Créer et arrêter des produits est également entravé par ce type d’organisation. Enfin, tout ce qui ne peut pas être facilement cantonné à un domaine unique devient l’objet de rivalités ou de partages complexes.
Nous, personnels des équipes SOFT et IVA, avons démontré notre capacité à produire et valider à un niveau de vélocité et de qualité dont nous sommes fiers en étroite collaboration avec nos collègues des entités thématiques. Le démantèlement de nos équipes est vécu comme une sanction injuste. Nous désirons favoriser un fonctionnement par équipes centrées sur des produits, mais traduire ces équipes en une organisation hiérarchique est une approche obsolète. C’était celle qui était en place avant la création de SOFT et IVA et qui avait échoué à délivrer des produits de qualité. C’est donc un retour 10 ou 15 ans en arrière qui est proposé, pas un progrès.
Nous, personnels d’Orange Innovation et du groupe Orange, vous appelons à faire changer l’orientation de cette réorganisation. Nous voulons une organisation regroupant des personnes partageant des compétences afin que tous disposent d’un cadre permettant le partage d’expériences, l’amélioration collective et individuelle et la dynamisation de l’innovation dans l’ensemble du groupe Orange. Nous voulons des équipes intégrant toutes les dimensions d’un produit et qui agrègent toutes les compétences nécessaires, avec la capacité de faire dimensionner et renouveler ces équipes en fonction des phases de vie des produits. Nous ne voulons plus de pseudo-verticales qui sont en fait des silos ou des fiefs car nous avons observé que la production de logiciels et services de qualités ont beaucoup plus besoin de développeurs, qualifieurs, exploitants, UX/UI designers, product owners, experts sécurité que de Vice-Présidents, Directeurs d’entité ou de responsable de programmes.
Nous déplorons aussi que peu de femmes soient impliquées dans la construction de la réorganisation et qu’elles soient quasi-absentes des postes de direction, ce qui fait craindre aux autres d’être à nouveau perdantes dans la nouvelle organisation.
Et enfin, alors que nous sommes toutes et tous psychologiquement fragilisé·es par deux ans de confinements et télétravail, que l’actualité internationale est angoissante, ajouter le stress d’une réorganisation qui ressemble à un règlement de compte est irresponsable. Il y a un risque social avéré, la prudence et le respect des salariés commandent de stopper cette réorganisation. Le procès en appel pour harcèlement moral qui s’est ouvert le 11 mai dernier devrait vous inviter à tirer les douloureuses leçons du passé pour ne pas réitérer aujourd’hui les mêmes dramatiques erreurs.